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Manuel


Manuel signe "AU TRAVAIL" Blow Book N°3


" AU TRAVAIL " par Manuel

Découvrez l'auteur à travers cette chronique de " Manuel 1-2-3 " du site www.du9.org


" Dans les images, l’homme n’est plus la mesure de toutes choses. Aujourd’hui, c’est le pixel qui fait mesure et par conséquent qui fait l’homme. C’est une peu, de prime abord, ce que Manuel essaierait de nous dire, décrivant une ville au cordeau, grouillante d’une vie humaine pressée, dont les têtes (et le reste) sont au carré.


Pourquoi un carré ? Parce qu’ici, sur le papier tramé, tramé (pour dire les choses) dans une encre bleue invisible au scanner puis à l’expérience du dessinateur,«La plus petite surface homogène constitutive d’une image» (comme dit le Grand Bob) est un carré. C’est l’unité minimale, l’atome, le quark, la corde qui vibre.

Ici, une tête est un carré dont le côté est composé de 6 de ces carrés minimaux. Comme ce monde de Manuel est pensé (avec la tête), ce carré magique de 6 x 6 est la brique fondamentale de cette humanité géométrique. Une brique tellement fondamentale qu’elle ne se restreint pas à l’élaboration des objets (voiture, avion, arrêt de bus, bâtiments, portes, etc.) mais s’étend aussi au déplacement. D’une image à l’autre elle est la distance parcourue par un personnage, une voiture. Le déplacement peut être à ce rythme, faisant d’une unité conceptuelle de 6 x 6, l’osmose du matériel et du temporel, accolant la quatrième dimension à une dimension immédiatement inférieure.


Vous vous étonnez que celle-ci ne soit pas uniquement bidimensionnelle ? Eh bien oui, vous serez étonné, ce monde n’est pas sans perspective. Certes elle est sans point de fuite et, par exemple, s’aperçoit quand il s’agit de franchir la porte d’un bureau où, justement, les perspectives se ferment. C’est peut être une limite, cela n’arrive pas souvent, mais la troisième dimension est là parfois sur ce support que plus qu’un autre, Manuel sait de deux dimensions.


Et que s’y passe-t-il donc ? Et bien, plein de choses. Comme dans «les vraies bandes dessinées», il y a des voleurs qui dépouillent quidams, banques ou musées, il y a des histoires d’amour, des poursuites sur terre et au ciel, des drames dans des gratte-ciels climatisées, des filles qui se baladent en soutif et aussi des sorcières qui jettent des sorts. Mais, oui, c’est certain, vous l’aurez noté immédiatement, c’est plus difficile à lire que «les vraies bandes dessinées». Manuel, d’un postulat direct, vous met la tête au carré, là où d’autres font tout pour que vous l’oubliez ou vous vous la preniez. Et sans être masochiste, c’est dans cette brutalité qu’est le plaisir. Manuel 1 2 3 dérange, déroute, semble facile à faire. Il se résumerait dans cette attitude paradoxale où il impose un regard qui demande un effort, tout en offrant une bande dessinée qui devrait se lire sans efforts, puisqu’elle est muette et dessinée ainsi.


Mais pourquoi s’effrayer de la difficulté ? Comme son titre l’indique, tout cela n’a rien de machinique. C’est manuel, fait à la main, qui même assurée reste un sismographe d’émotions. Dans ces pages, l’erreur est humaine et l’irrespect des règles les mieux établies aussi. Le carré ne fait peut-être plus 6 x 6 ? Et alors ? Les personnages ne se superposent plus et se grimpent dessus ? Pourquoi pas ? Il y a des changement de plans, de perspective, de taille des cases ? Bien sûr, puisqu’il s’agit d’une bande dessinée. Ce qui est passionnant dans ce livre c’est que l’auteur impose un langage personnel pour montrer en creux certaines particularités de la bande dessinée. Et plus particulièrement cette évidence, un peu oubliée par les habitudes de lecture, le savoir-faire virtuose ou suiveur des auteur(e)s, qu’une bande dessinée se lit, se décrypte dans son langage codé. Lire une bande dessinée n’est pas naturel, ne rien n’y comprendre l’est beaucoup plus."


Chroniqué par Jessie Bi en novembre 2008

Sur le site www.du9.org


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